
X ne se contente pas de partager : le mythe d'une plateforme neutre
À première vue, X (anciennement Twitter) semble n’être qu’un réseau social parmi d’autres. Un endroit où chacun peut partager ses idées, relayer des faits, et suivre l’actualité. Mais en période de conflit, cette image d’outil neutre ne résiste pas à l’analyse. Derrière la promesse d’un partage ouvert, se cache un système algorithmique et économique qui oriente, amplifie et biaise la perception des faits.
Un algorithme qui trie, pas qui transmet
Contrairement à ce que beaucoup pensent, X ne montre pas tout à tout le monde. La plateforme hiérarchise les publications selon un algorithme opaque, qui valorise avant tout l’engagement. Résultat : les contenus les plus visibles sont ceux qui suscitent des réactions émotionnelles fortes, pas nécessairement ceux qui informent avec rigueur. Cette logique algorithmique crée une bulle de récits simplifiés, polarisés, souvent faux ou déformés.
X Premium : la visibilité achetée
Depuis le rachat par Elon Musk, les comptes qui paient l’abonnement Premium (anciennement Twitter Blue) sont systématiquement favorisés. Une étude de NewsGuard révèle que 74 % des contenus viraux liés à la guerre Israël-Hamas provenaient de comptes vérifiés Premium (source). Ces comptes diffusent parfois des images truquées ou hors contexte, atteignant des millions de vues avant toute correction.
Le rôle des émotions dans la viralité
Des recherches menées par le MIT ont montré que les fake news se propagent six fois plus vite que les faits sur les réseaux sociaux, car elles provoquent colère, peur ou surprise. X capitalise sur ces émotions pour maintenir l’attention, au détriment de la véracité. C’est une stratégie qui renforce les récits extrêmes et polarise davantage les opinions.
Des armées de bots pour brouiller le signal
Selon une étude publiée sur arXiv, près de 25 % des tweets sur Gaza sont générés ou amplifiés par des bots. Ces comptes automatisés simulent l’opinion publique, diffusent des récits coordonnés et noient les voix légitimes sous un flot de contenu biaisé. La désinformation devient alors structurelle, pas accidentelle.
Community Notes : la rustine qui n’éteint pas l’incendie
Le programme de vérification collaboratif Community Notes est souvent présenté comme une réponse aux dérives. Mais selon le Tow Center, les notes sont 13 fois moins vues que les publications corrigées. Le correctif arrive souvent trop tard, et ne touche qu’une fraction des lecteurs. Dans ce contexte, il ne s’agit pas d’un contre-pouvoir, mais d’un affichage.
Quand le virtuel influence le réel
Les récits amplifiés sur X ont des conséquences diplomatiques et sociales concrètes. En juillet 2025, une fausse information sur la disparition de 400 000 civils palestiniens a circulé, déclenchant des réactions officielles, avant d’être démentie par l’AP (source). Cette confusion permanente affaiblit les journalistes, alimente les discours complotistes, et déstructure la compréhension collective.
Vers une régulation européenne ?
Face à ces dérives, l’Union européenne a commencé à réagir. Le Digital Services Act (DSA) impose désormais aux grandes plateformes comme X une obligation de transparence algorithmique et de modération renforcée des contenus illicites. Mais la mise en œuvre reste complexe, et X a déjà été pointé pour son manque de coopération. La question de la responsabilité des plateformes reste donc centrale.
Conclusion : X n’est plus un miroir, c’est un prisme
L’idée que X « permet juste de partager » est une illusion dangereuse. En réalité, la plateforme filtre, oriente, amplifie. Et ce processus n’est ni neutre, ni anodin. Face à cela, la vigilance critique est essentielle. Car dans un monde où tout le monde peut parler, ceux qui structurent la conversation détiennent un pouvoir immense.
Pourquoi X est-il accusé de favoriser la désinformation ?
Parce que son algorithme met en avant les contenus qui génèrent de l’engagement, souvent au détriment de leur véracité. Les comptes Premium payants ont également une meilleure visibilité, ce qui renforce les déséquilibres.
Les notes de Community Notes sont-elles efficaces ?
Peu. Les notes sont souvent publiées tardivement, et ne touchent qu’une minorité des utilisateurs ayant vu le tweet initial. Leur impact est donc limité dans la lutte contre la désinformation virale.
Existe-t-il un cadre légal pour réguler X ?
Oui. Le Digital Services Act (DSA) de l’Union européenne impose des obligations aux grandes plateformes. Mais X a été plusieurs fois accusé de ne pas respecter ces règles, et les sanctions restent rares pour l’instant.
Comment éviter de tomber dans le piège de la désinformation ?
Toujours recouper les sources, privilégier les médias reconnus, vérifier les images via des outils comme InVID, et se méfier des contenus trop émotionnels ou sensationnalistes.